Raison ou déraison ?

 

Nous sommes en pleine période où l'on prône "l'agriculture raisonnée", voie médiane entre l'agriculture intensive et l'agrobiologie, nous dit-on à grand renfort de publicité. Autre précision : "L'agriculture raisonnée est une remise en cause des mauvaises habitudes nées du productivisme des années 60… elle va être réglementée par décret."

Pour Jean Glavany, ministre de l'agriculture, "le référentiel national est exigeant et équilibré" et pour Yves Cochet, ministre de l'environnement : "Je souhaite le développement d'une agriculture plus raisonnable que raisonnée". Quant à René Louail, l'un des porte-parole de la Confédération paysanne, il déclare : "il ne s'agit pas d'une remise en cause du système intensif mais d'une manière de le rendre acceptable aux yeux de la société." Lisez, relisez. Ça vaut une tonne de sous-entendus !

Ainsi, pour cette "agriculture raisonnée", les agriculteurs pourront employer des engrais chimiques, des pesticides, des insecticides, à condition d'en réduire les quantités. Ils pourront donc polluer, empoisonner la terre, l'air, l'eau en toute conscience puisque le décret les y autorise. Et le lait, les sous-produits laitiers, la viande, les légumes, les fruits, seront toujours lestés de produits chimiques, d'aliments médicamenteux. Et tout le reste permis en ce qui concerne l'espace vital des animaux à l'étable, le debecquage de la volaille, l'écornage des bovins. Tout ou presque tout est admis dans l'agriculture raisonnée, même l'épandage des boues des stations d'épuration. A votre bonne soupe, messieurs-dames !

A défaut de sagesse paysanne, quand entendra-t-on le raisonnement sain des paysans ?

 

Marcel Bénézit